L’absence de recommandation sanitaire en faveur d’une utilisation de la vitamine D pendant une période à risque infectieux interroge alors que les mécanismes d’action de la vitamine D sur l’immunité sont connus.
Combien parmi les anciens ont fait la grimace, enfant, lorsque leur ma- man leur donnait une cuillère d’huile de foie de morue, seule solution dans cette période d’après-guerre pour permettre un apport important en vitamine D ?
Activant entre 3 et 4 % du génome humain, la vitamine D possède une multitude de fonctions bien au-delà des effets sur la minéralisation osseuse et la prévention du rachitisme (la vitamine D est prescrite aux jeunes enfants), agissant sur le muscle, le système immunitaire, le rein, l’appareil cardiovasculaire notamment. Aujourd’hui, la vitamine D est une molécule essentielle, tant en terme de prévention que de traitement, en cas de Covid-19.
Petit rappel
La première source de vitamine D pour l’humain est le rayonnement solaire (ultraviolets B) : la molécule dérivée du cholestérol devient vitamine D3 après son passage dans le foie, puis devient active après son passage dans le rein.
En été, 15 à 20 minutes d’exposition quotidienne au soleil suffisent en moyenne pour produire une quantité satisfaisante de vitamine D.
En hiver, elle diminue sous nos latitudes suite à la diminution du rayonnement solaire. À cela s’ajoutent la pigmentation de notre peau ou encore le vieillissement qui influencent cette production.
L’alimentation fournit seulement 10 à 15 % des besoins. L’huile de foie de morue possède la quantité la plus importante, mais il faudrait absorber 80 œufs ou 1,5 kilos de saumon par jour pour répondre à ces besoins !
La supplémentation orale sous forme de vitamine D3 est l’alternative aujourd’hui en période automnale ou hivernale. Il n’y a, en théorie, pas de surdosage à craindre.
Le carburant du système immunitaire
La vitamine D soutient et améliore la réponse du système immunitaire aux infections. Elle stimule l’immunité innée, celle qui est non spécifique, et l’immunité adaptative (production d’anticorps ou l’action directe des lymphocytes sur le germe) et réduit en conséquence le risque d’infection microbienne.
Martineau et al2 , dans leur méta-analyse regroupant 10 933 participants inclus dans 25 essais cliniques randomisés, ont montré un effet protecteur global de la supplémentation en vitamine D sur les infections du tractus respiratoire. L’effet protecteur mesuré était encore plus important chez ceux recevant la vitamine D quotidiennement ou hebdomadairement (dose entre 20 et 50 μg, c’est à dire entre 800 et 2000 UI).
Un autre essai3 randomisé, mené en Espagne auprès de 930 patients hospitalisés, a révélé une réduction de 80 % du recours aux soins intensifs et de 60 % de la mortalité chez les patients recevant de la vitamine D à forte dose.
Ainsi, un meilleur taux de vitamine D, au-dessus de 30 μg, réduit la sévérité de la Covid-19, alors qu’une carence en vitamine D augmente le risque de Covid sévère (cf. diagramme). L’Académie de médecine a publié un rapport confirmant sa recommandation d’assurer un complément en vitamine D en période Covid, de doser la vitamine D chez la personne âgée et de majorer cette supplémentation en cas de Covid-194.
Nous avons tous entendu parler, ces derniers temps, de cet orage inflammatoire qui survient lors d’une forme grave de la Covid-19 : l’organisme déclenche une production rapide et intense de cytokines, des protéines au pouvoir toxique important sur différents organes, qui entraîne une détresse respiratoire.
La vitamine D bloque la production des cytokines pro-inflammatoires et le risque de Covid grave.
Conseils d’utilisation en période Covid
Démarche préventive : elle concerne les personnes au-delà de 50 ans et/ou porteuses de maladies chroniques, surtout en période hivernale. Les recommandations de la littérature se situent entre 800 et 2000 UI ; la prise quotidienne doit être favorisée ; la dose doit être augmentée en cas de surpoids. Demander conseil à votre pharmacien ou votre médecin traitant.
Démarche curative : une supplémentation quotidienne à doses plus élevées est recommandée sans attendre une éventuel dosage prescrit par votre médecin.
Aucune recommandation officielle n’existe en France concernant la prise de vitamine D en période de Covid alors qu’une autre étude5 montre une baisse de 4,7 fois du nombre de passage en unité de soins intensifs et 4 fois moins de décès avec une supplémentation en vitamine D.
Pourquoi ce silence assourdissant des experts nationaux, des agences de santé ou du ministère ? À chacun de trouver une explication, le débat est ouvert ! Mais pour passer un meilleur hiver, osons conseiller aux plus fragiles (âge, surpoids, maladie chronique) une prise quotidienne de vitamine D !
À retenir
– De nombreuses situations favorisent le manque de vitamine D : parlez-en avec votre médecin traitant ou votre pharmacien. En dehors de situations identifiées par la CPAM, le dosage n’est pas remboursé par la sécurité sociale, et le coût est de 10,53 euros. Une supplémentation en vitamine D peut ainsi être instaurée et suivie sans dosage de la vitamine D.*
– Un dosage de vitamine D3 pour chacun d’entre nous, dès l’âge de 50 ans en cas de maladie chronique, est utile. N’hésitez pas à en discuter avec votre médecin traitant.
– La vitamine D est un complément alimentaire disponible en pharmacie et remboursé sur prescription médicale.
– Dosage : valeur normale : > à 30 μg/l ; valeur basse : < 30 μg/l ; carence sévère : < 12 μg/l.
*https://www.ameli.fr/dordogne/laboratoire-danalyses-medicales/exercice-liberal/memos/dosage-vitamine
Pour en savoir plus
– Pour un aperçu de toutes les études sur la vitamine D dans le cas de la Covid-19, voir : https://c19vitamind.com/
– Pour une synthèse sur les modalités d’action de la vitamine D : conférence de Jean-Marc Sabatier, directeur de recherche au CNRS : https://crowdbunker.com/post/Mqr69rxT
– Pour consulter La Revue du praticien : https://www.larevuedupraticien.fr/article/effet-benefique-de-la-vitamine-d-dans-la-covid-quelles-sont-les-donnees.
Dr Salsa
Sources
- « Vitamin D supplementation : guidelines and evidence for subclinical deficiency », Pornpoj Pramyothin 1 , Michael F Holick ; Current Opinion in Gastroenterology. 2012 Mar;28(2):139-50. doi: 10.1097/ MOG.0b013e32835004dc.
- Martineau AR et al. « Vitamin D supplementation to prevent acute respiratory tract infections: systematic review and meta-analysis of individual participant data ». BMJ. 2017;356: i6583. doi:10.1136/bmj. i6583.
- Nogués X et al. « Calcifediol Treatment and COVID-19-Related Outcomes », SSRN Electron J. 2021. doi:10.2139/ssrn.3771318
- Communiqué de l’Académie de médecine du 22 mai 2020.
- « Effect of calcifediol treatment and best available therapy versus best available therapy on intensive care unit admission and mortality among patients hospitalized for COVID-19: A pilot randomized clinical study » Marta Entrenas Castillo et al., J Steroid Biochem Mol Biol 2020 Oct;203:105751. doi: 10.1016/j.jsbmb.2020.105751. Epub 2020 Aug 29.