Europe : c’est notre tour !

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Sous la présidence française, ambitions européennes et politique macronienne vont-elles faire bon ménage ?

Depuis le 1er janvier 2022 et jusqu’au 30 juin 2022, la France prend la présidence de l’Union européenne. Elle précède ainsi la République tchèque (juillet-décembre 2022) et la Suède (janvier-juin 2023) dans la recherche de compromis aux problèmes politiques entre les gouvernements des 27 États-membres ou les gouvernements et le Parlement européen. C’est ainsi l’occasion pour la France d’inscrire à l’agenda certaines de ses priorités. Le 9 décembre dernier, Emmanuel Macron a présenté ces chantiers prioritaires.

Il s’agit là de directives permettant à l’actuel président de la République française, en campagne pour sa propre succession, de donner les grandes lignes et pouvoir être représenté jusqu’en juin 2022 à l’UE. Bien qu’il ne s’agisse pas à proprement parler d’une incompatibilité, la superposition des calendriers apparaît comme inopportune dans le plein investissement conféré à cette mission.

Depuis plus de soixante ans, la citoyenneté européenne se construit dans le seul but de préserver la paix sur le continent et d’avancer ensemble pour construire un monde meilleur avec pour devise : « L’Europe unie dans la diversité ».

Pour Emmanuel Macron, le moment est venu de définir une « souveraineté stratégique européenne » dont l’adoption est prévue en mars 2022. Elle se traduit par l’approfondissement de l’Europe en termes de défense et de sécurité pour les prochaines années, se matérialise par un meilleur contrôle des frontières internes et externes de l’UE et une ré- forme de l’espace Schengen… Dans la mesure où la France possède une forte industrie d’armement, la question se pose d’un éventuel conflit d’intérêts à la demande de production d’armes, d’autant que cette orientation pourrait ne pas s’inscrire dans la démarche de paix mise en œuvre depuis le début.

Les relations avec le reste du monde

La troisième dimension de l’Europe souveraine est définie comme « la stabilité et la sécurité de notre voisinage ».

Emmanuel Macron propose une relation « structurante » entre l’Europe et l’Afrique et une conférence sur les Balkans occidentaux, qui se tiendra en juin 2022. Cependant, adopter la contrainte ou l’intimidation ne semble pas s’inscrire dans une démarche de paix durable basée sur la recherche de consensus et le développement des intérêts nationaux. Pourquoi ne pas plutôt envisager une aide au développement ou des accords commerciaux que de se placer en puissance moralisatrice ?

Orienter les politiques économiques

Selon Emmanuel Macron, le nouveau modèle de croissance repose sur de « bons emplois »… La réforme récente du code du travail en France n’œuvre pas en ce sens !

N’abordant pourtant pas les problématiques climatiques sur son propre territoire, la France présidente de l’UE défend un nouveau modèle économique caractérisé par l’ambition climatique. Mais programmer quatre cents événements en six mois, si « respectueux de l’environnement » et promettre « d’inclure tous les publics » présage-t-il un changement concret dans la vie du citoyen européen ?

Paradoxalement, le président souhaite promouvoir une « souveraineté technologique » européenne par la construction d’un réel marché unique du numérique dont l’impact écologique n’est ni négligeable ni régulé…

Impliquer plus les gouvernements et les populations

L’humanisme européen prôné par le président français à travers une Europe « à taille humaine » repose sur « un combat politique existentiel pour nos valeurs et pour notre union ». Mais les valeurs de l’Europe sont-elles respectées ? Souvenons-nous des migrants rescapés de la noyade, repoussés par les pays de l’UE, et la France refusant d’accorder son pavillon à l’Aquarius.

La piste de réflexion évoquée par Emmanuel Macron sur la liberté de la presse est bien loin de la pratique française où les médias nationaux sont détenus par les grands groupes financiers, contrairement aux pays nordiques.

Odray Monhett


Sources